Les sucres complexes jouent des rôles multiples et essentiels dans le monde vivant : éléments de structure (cellulose), substances de réserve (amidon), signaux moléculaires (comme ceux des groupes sanguins)… Cette variété de fonctions repose sur des structures elles aussi très diverses, liées à une multiplicité de briques élémentaires et aux différentes façons de les agencer. La dégradation de ces glucides requiert donc une variété d’enzymes spécifiques, qui sont loin d’être toutes identifiées, en particulier dans le monde microbien : le génome humain n’en contient qu’une douzaine mais notre microbiote intestinal 60 à 70 000 ! Deux équipes françaises du CNRS ont conçu une méthode pour accélérer la découverte de ces enzymes, et en ont identifié d’un coup 79 nouvelles, ainsi que 13 nouvelles familles (alors que moins de 200 familles avaient été décrites en plus d’un siècle). Avec des méthodes de bioinformatique, des scientifiques du laboratoire Architecture et fonction des macromolécules biologiques (CNRS/Aix-Marseille Université) ont recherché dans des milliers de génomes des gènes pouvant coder ces enzymes. Ils ont ensuite produit les protéines correspondant à 560 de ces séquences. Des chercheurs du Centre de recherches sur les macromolécules végétales du CNRS, à Grenoble, ont alors pris le relai afin d’identifier la fonction de ces enzymes : pour cela, ils les ont exposées à une collection de plus de 200 sucres complexes. Malgré les nouvelles découvertes publiées cette semaine dans PNAS, il reste 243 protéines dont l’activité n’a pu être établie. Outre la meilleure compréhension du vivant qu’elles permettent, ces enzymes peuvent devenir des outils dans des domaines variés, des bioénergies aux cosmétiques en passant par la nutrition.